Santé - Surf adapté
Échanger des médicaments pour du surf? Ça sonne trop beau pour être vrai. Pourtant, le surf comporte tellement de bienfaits que sa pratique est désormais recommandée par les professionnels de la santé. Le but? Prévenir ou atténuer les symptômes de certaines maladies ou conditions physiques particulières. Une réalité qui voit peu à peu le jour à travers le monde grâce à des programmes offerts notamment aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni.
Crédit photo: Nathan Fagan / Texte par Hassan Laramée
En France, la loi reconnaît depuis maintenant un an le sport, dont le surf, sur ordonnance pour améliorer l’état de santé, que ce soit physique ou psychologique. Une pratique à laquelle a recours le médecin et surfeur Guillaume Barucq. Ce docteur de Biarritz s’est d’ailleurs associé à une cinquantaine de fédérations sportives et le Comité national olympique et sportif français en vue de produire un guide de référence d’ordonnances du sport pour le corps médical. Guillaume Barucq est également fondateur du programme de santé Surf Thérapie, basé sur la thalassothérapie, qu’il explique être « l’utilisation des bienfaits de la mer qui sont potentialisés par l’activité physique et un encadrement médical adapté. » Ce n’est donc pas seulement le sport lui-même mais aussi l’effet de l’océan sur l’organisme qui est à l’origine des bienfaits du surf.
« Les vagues qui se brisent dans l’eau ou sur le sable entraînent la cassure de molécules qui libèrent des ions négatifs. Ils améliorent l’oxygénation des tissus, l’humeur, le tonus, la qualité du sommeil, la concentration… » – Guillaume Barucq à Le Nouvel Observateur
Qui sont ces gens pour qui des professionnels de la santé comme Guillaume se mobilisent tant? Il y a ceux atteints d’autisme vivant en permanence avec une surcharge sensorielle, sur qui donc le surf aurait un effet apaisant. Il y a ceux ayant subit un stress post traumatique, pour qui le surf aiderait à chasser les douleurs fantôme plus efficacement que les anti douleurs. Puis tous ces gens atteints de fibrose kystique, de paralysie cérébrale, du syndrome de Down, de dystrophie musculaire… la liste est longue.
Puis, il y a moi. Bien que je n’ai jamais participé à de telles thérapies, savoir qu’elles existent m’aura servi de bouée de sauvetage. Je me suis initié au surf à Baja, un an avant de faire un accident de vélo de montagne m’ayant laissé entre la vie et la mort. Je suis aujourd’hui heureux d’être en vie malgré que je dois la vivre avec une tétraplégie. Les jours suivants mon accident, coincé à l’hôpital, j’ai regardé beaucoup de films de surf. Je suis tombé sur le film Step Into Liquid que j’ai écouté attentivement. En particulier lors de la séquence où il y est présenté un surfeur paralysé aux membres inférieurs qui réussit à surfer avec l’aide des ses amis. À cet instant, j’ai eu un déclic d’espoir. Je n’avais qu’une idée en tête: celle de reprendre ne serait-ce qu’une vague dans ma vie.
L’année suivante, j’ai récupéré le plus possible, redoublant d’effort en physiothérapie pour déjouer les pronostics des médecins qui ne croyaient pas en l’amélioration de ma mobilité. Je voulais retourner chez moi et tenter de mettre en branle mon projet de surfer à nouveau en effectuant des recherches.
Mick Fanning et David ‘Barney’ Miller, suite à l’accident ayant paralysé ce dernier, dans le documentaire «You and Me».
Presque 10 ans plus tard, je parle, je mange, je bois et j’arrive à bouger ma tête et mes épaules (eh oui, les médecins auront eu tord là-dessus!). Même si je n’ai toujours pas goûté au surf à nouveau, j’ai le désir ardent d’y arriver et de déjouer une fois de plus les probabilités. J’ai compris au fil des ans à quel point le surf m’a été utile pour m’accrocher. Ce pourrait d’ailleurs être le cas pour plusieurs autres personnes, qui peut-être n’ont même jamais eu la chance d’en faire l’essai.
Je crois donc qu’il serait temps d’innover et de passer à l’étape supérieure. De s’inspirer des programmes adaptés qui sont mis sur pieds un peu partout dans le monde tel que celui instauré par Guillaume Barucq. L‘International Surfing Association (ISA) possède même sa division de surf adaptée, dont la compétition se tenait d’ailleurs du 8 au 11 décembre dernier!
Je crois qu’il serait donc réellement temps d’informer et de sensibiliser une toute autre clientèle. Promouvoir le surf et ses nombreux bienfaits non seulement chez les personnes atteintes de différentes maladies et handicaps physiques ou psychologiques, mais aussi chez ceux qui ont le pouvoir de faire changer les choses.
Pour y arriver, pourquoi ne pas créer une association de surf pour celles-ci? Une association qui s’inspirerait de celles déjà bien établies, comme Disabled Surfers Association en Australie, l’Association Nationale Handisurf en France, Disabled Sports USA et Surfer’s Healing aux États-Unis. Qui ferait de la sensibilisation auprès des centres de réadaptation et qui développerait des partenariats avec les différents lieux et centres de surf afin de bâtir une offre dédiée à ceux et celles aux prises avec des restrictions. Puis ultimement, l’organisation de petits trips sur la côte Est des États-Unis! En s’associant avec des surf shops et des instructeurs, cela rendrait l’expérience de surf en mer réellement tangible aux participants afin de ressentir ce high, ces frissons que tous les surfeurs vivent. Le projet est ambitieux, certes, mais les ressources sont plus présentes que jamais pour le rendre possible !