Vagues 101 ou pourquoi il est possible de surfer le Saint-Laurent

Je pense qu’en tant que surfeurs, on peut tous se mettre d’accord sur une chose ; les vagues, peu importe leur origine, nous apportent un plaisir infini. Même si parfois ça peut paraître simple pour les néophytes, on sait pertinemment que ça peut aussi bien devenir un sérieux casse-tête que de prédire les vagues. Pour plusieurs, incluant moi à une certaine époque, on se dit que d’aller vers un gros plan d’eau comme l’océan Atlantique par exemple, pour surfer, c’est « une valeur sûre » presque toute l’année. Après tout, à 6 879 km de largeur au maximum, ça donne quand même pas mal de place pour la formation de vagues. Je me suis rapidement rendu compte après une semaine complète à Lawrencetown Beach, Nouvelle-Écosse, durant l’automne, que ce n’est pas tellement « une valeur sûre » finalement. Surtout que lors de mon retour à Rimouski j’ai surfé quatre jours en file… sur le Saint-Laurent. Qu’est-ce qui fait en sorte que sur un plan d’eau presque 100 fois moins large que l’Atlantique, on réussisse à avoir des conditions surfables alors que l’océan ne fournissait rien?

Photos : Jean-Christophe Lemay

Le secret réside dans plusieurs éléments clés, le premier étant la base, la formation des vagues. Ça peut paraître anodin, mais il y a tout de même plus de détails que l’on peut croire, parlez-en aux gens de surfline et magicseaweed qui doivent prévoir le swell pour les spots du monde entier sans se tromper, je suis certain qu’ils confirmeront. Donc une vague c’est quoi ? Il y en a plusieurs types, dont les tsunamis et les marées, mais ici on va se concentrer sur celles générées par le vent, sinon tu vas te tanner avant la fin.


LA HOULE

Gardons en tête ici que les vagues se forment d’abord quelque part dans le milieu de l’océan sous forme de houle, pas trop de surprise jusqu’à maintenant. La hauteur des vagues que l’on regarde sur les sites de prévision se nomme aussi l’amplitude, la hauteur entre le creux et la crête de la houle retrouvée au large. Pense à tes sorties en bateau, sur l’océan ou ailleurs, quand ça monte et redescend, nécessairement tu vas comprendre. Puis, la période représente le temps entre les crêtes. Ça passe de 0,5 seconde pour de la toute petite houle, jusqu’à plusieurs minutes ou même heures dans le cas des Tsunamis !! On peut aussi mesurer la distance entre les crêtes, ce que l’on nomme longueur d’onde, facteur important de la vitesse des vagues. Terminé pour le glossaire.

LE VENT

Pas de vent, pas de swell surfable, simple de même, ou presque. Attention, ici pas besoin de vent sur la côte nécessairement, mais bien à un endroit sur le plan d’eau en question. C’est que l’énergie du vent qui souffle est transmise à la surface de l’eau, selon différentes intensités. Ça débute généralement avec de la petite houle et grandit selon trois éléments clés, la direction du vent, le temps durant lequel il souffle et la superficie sur laquelle il souffle (on nomme cette donnée le fetch). La houle part donc de cet endroit, c’est son lieu de formation. Tu as sans doute déjà vu une image aérienne d’un ouragan, du vent qui souffle à des vitesses pas possibles, sur une énorme surface, dans la même direction parfois pendant des jours et des jours, bingo. Maintenant, tu comprends aussi pourquoi c’est plus difficile d’obtenir de belles vagues sur de petites étendues d’eau comme le fleuve, le fetch est super limité, même à pleine largeur.

LE SWELL

Une fois sorties du fetch, les vagues prennent alors la forme de swell, beaucoup plus ordonnées (période et amplitude plus précises et régulières) et deviennent soumises à d’autres vents locaux pour les pousser vers nos plages ou breaks. Lors du déplacement au large de la côte, les vagues maintiennent leur vitesse, étroitement reliée à leur longueur d’onde. Plus de distance entre les vagues, plus de vitesse et plus d’énergie, et ce sera plutôt constant jusqu’au break. Bon ok, beaucoup de mots pour dire que le swell est souvent observé à des centaines de kilomètres de son lieu de formation et que plus les vagues sont distantes, plus elles se déplacent vite (et TE déplacent vite sur ta planche).

LE BREAK

Quand la vague arrive près des côtes, elle commence à interagir avec le fond marin, ce qui la ralentit. Comme la vitesse diminue, l’énergie de la vague est concentrée vers le haut, la crête, qui gagne en amplitude. Plus l’énergie est forte et concentrée vers une profondeur de plus en plus basse, plus on pousse vers le haut et fait augmenter l’amplitude. À un certain point, la vague finit par briser, n’ayant plus de place pour stocker cette énergie, donnant naissance au break.  Il existe différents types de fonds, différents types d’interactions, différents types de breaks, mais ça, c’est un autre sujet.

On peut donc avoir un swell qui entre à Rimouski, parce que le fetch était bon sur le Saint-Laurent à ce moment, alors qu’au même moment aux meilleurs spots de la côte est c’est absolument flat. OK, j’avoue, ça arrive rarement, parce que souvent les tempêtes touchent les deux en même temps, mais ça se peut !