L’Islande d’Heiðar Logi, surfeur de «The Accord»

Le surfeur d’eau glaciale Heiðar Logi Elíasson a vraisemblablement le vent dans les voiles. L’Islandais de 24 ans perce l’écran du film de surf The Accord présenté dans le cadre de la tournée du Festival du film de montagne de Banff, en plus d’apparaître dans le documentaire du célèbre photographe Chris Burkard Under An Arctic Sky, également tourné en Islande. On le retrouve même furtivement la planche sous le bras dans le documentaire Givendont la première canadienne se tiendra la semaine prochaine.

Crédit photo couverture: Elli Thor Magnusson

En plus d’avoir participé à ces projets d’envergure, Heiðar a récemment rejoint l’équipe de 66°North, ce qui fait de lui le premier surfeur professionnel de son pays. S’il se dit chanceux de vivre de sa passion, Heiðar avoue avoir vécu maintes épreuves personnelles avant de se rendre où il en est aujourd’hui. Un passé troublé par l’alcoolisme et un TDAH qu’il semble tout de même accepter avec sagesse. Peut-être parce qu’il a abouti sur un futur prometteur, parmi lequel on sent qu’Heiðar réservera toujours à l’Islande la place qui lui revient. Curieux de savoir à quoi ressemble la vie d’un surfeur professionnel dans des conditions aussi impitoyables que celles de l’Islande, OuiSurf a posé 10 questions à Heiðar Logi Elíasson. 

Crédit photo: Elli Thor Magnusson

Qu’est-ce que ça représente pour toi d’avoir pu créer un film de surf avec ta gang chez toi, qui peut maintenant être vu à travers le monde?

La réalité c’est que The Accord n’est pas mon film. Le scénariste et producteur Elli Thor Magnusson et le co-scénariste et directeur RC Cone ont développé l’idée et la structure du film. Ce sont donc eux qui l’ont créé. Bien que je sois le surfeur qu’on y voit, je ne peux pas prendre le crédit excepté pour avoir été moi-même. Mais évidemment, j’aime le fait d’avoir fait partie de quelque chose dont je peux être fier. Tourner dans un film de surf Islandais, avec de la musique islandaise, avec des Islandais a toujours été l’un de mes rêves. Je suis chanceux de connaître des gens comme Elli et RC qui m’ont embarqué dans le projet.

Qu’est-ce qui a changé dans ta vie depuis que tu es un surfeur professionnel?

Je peux désormais vivre de ma passion. Bien que je ne fasse pas de compétition, je collabore donc avec certaines marques pour les représenter et m’assurer qu’elles ont de la visibilité dans mes activités. Je peux donc poursuivre mes rêves à un degré supérieur. Avant, je devais faire certaines jobs pour vivre ma passion sur le «side» alors que désormais, je peux la vivre à temps plein. Faire les voyages que je veux et poursuivre les aventures que j’ai envie d’entreprendre.

Si les conditions hostiles et le vent capricieux de l’Atlantique rendent les sessions de surf rares et difficiles, comment arrives-tu à t’améliorer ou du moins, garder le niveau?

Tu n’as pas besoin de bonnes sessions pour améliorer tes capacités en surf. Quand tu surfes sur un terrain de jeu difficile, c’est là que tu deviens meilleur. Plus dures sont les conditions, le meilleur tu deviens.

L’Islande, ça a l’air magnifique mais en toute honnêteté, que préfères-tu: surfer là-bas ou surfer dans une destination où les conditions sont souvent plus clémentes, comme l’Indo?

J’ai toujours préféré surfer à la maison même si les vagues sont plus froides et sûrement pas aussi bonnes et constantes qu’ailleurs. J’aime être près de l’endroit où j’ai grandi. Puis mon amour du surf provient du partage que j’en fais avec mes amis et des gens autour de moi. Et il y a tellement d’endroits incroyables en Islande où je ne suis jamais allé! C’est vraiment grand et il y a tant de diversité au niveau de ses paysages. Tu peux passer beaucoup de temps à chercher des vagues, il y a tant encore à explorer. Alors d’être originaire d’ici entouré de mes amis, je préférerai toujours surfer à la maison.

Crédit photo: The Accord film / Tributaries Digital Cinema

Il y a 2 choses qu’on voit dans The Accord qui ont grandement affecté ta vie: le surf et l’alcool. Est-ce que c’est le surf qui t’as à 100% sorti de cette dépendance?

Je dirais que oui. C’est devenu tellement une grande passion que ça m’a aidé à réaliser ce que je voulais réellement et ce je ne voulais pas. C’était clair pour moi que si je buvais beaucoup, alors je surfais moins. Ces deux choses ont commencées à interférer entre elles. J’ai senti que je devais faire un choix, celui de rendre ma vie plus saine.

« Quand j’étais plus jeune, je faisais beaucoup le party et je buvais pas mal. Ça a arrêté de donner un sens à ma vie. » – Heiðar Logi Elíasson 

Crédit photo: The Accord film / Tributaries Digital Cinema

Suite à cette décision, tu as confié au magazine Rolling Stone tu veux dorénavant remplir ta vie de choses qui ont une signification pour toi. À part le surf, quelles sont-elles?

J’ai commencé à me concentrer davantage sur moi-même, ma santé, et d’accorder plus d’importance aux choses qui ont de la valeur pour moi. Ces dernières années, j’ai fait beaucoup de yoga, et adopté un style de vie plus sain, notamment en mangeant mieux. Quand je ne surf pas ou que je ne fais pas de yoga, je travaille le bois, plus particulièrement des meubles. J’ai commencé simplement, avec des tablettes, puis maintenant je travaille sur une table au style rétro des années 70. J’ai essayé de faire une planche de surf une fois mais ça été tellement de travail! Ça a pris beaucoup de temps et c’était cher aussi.

 

L’Islande est véritablement devenu un pôle touristique depuis quelques années. Comment est-ce que ce phénomène affecte ta vie?

J’adore ça! J’aime voir plus de monde et plus de vie autour d’ici. Ça fait partie de ces choses qu’on doit apprendre à vivre avec. Tu peux soit voir le côté positif des choses ou le côté négatif. Évidemment, il y en a dans les deux côtés, ça dépend duquel du décides de regarder les choses. Je n’ai pas de contrôle sur la situation donc mieux vaut en profiter et accueillir les touristes à bras ouverts et leur faire sentir les bienvenues.

Niveau surf, je n’ai rien remarqué de spécifique dans l’eau en lien avec ça. Tout dépend de la saison évidemment. L’été est la période la plus achalandée compte tenu que la température est plus chaude, mais rien de majeur à mentionner.

Tu fais aussi partie du documentaire de Chris Burkard Under An Arctic Sky. Est-ce que l’expérience était aussi incroyable que la bande-annonce le laisse paraître?

C’était l’un des surf trips les plus extraordinaires que j’ai vécu! On a été assommé par les tempêtes pendant les 10 jours qu’a duré le périple. On a vécu les plus grosses tempêtes de neige que l’Islande a reçu depuis les 25 dernières années. C’était absolument débile. On a même été pris dans un col d’une montagne alors que je n’avais jamais été coincé dans une tempête de neige auparavant. Le 3e jour, on a manqué d’électricité et on a été pris dans une cabane durant 3 jours. Mais on a été chanceux d’avoir eu de si bonnes vagues. C’était épeurant et l’fun en même temps. C’est ce qui je crois constitue d’ailleurs l’essence d’une bonne aventure.

En tant que Canadiens, on doit souvent «dealer» avec des conditions similaires à celles de l’Islande. As-tu des recommandations pour ceux qui doivent conduire pendant 5 heures sans l’assurance de tomber sur de bonnes vagues?

Pour moi, avoir à conduire pendant des heures à travers des conditions difficiles seulement pour une session ou deux, c’est ce que le surf représente. De sacrifier temps et argent au profit d’une chance dont le vent fera tourner ou non. Même si tu ne scores pas, ça reste un bon trip, pendant lequel tu as bûché fort. Ce qui compte c’est que tu as essayé, que tu aies investi ton temps et ton énergie dans quelque chose que tu aimes.

Crédit photo: Elli Thor Magnusson

Damn right. Dans quels autres projets te lanceras-tu cette année?

Cette année sera différente. Elli et moi pensons créer un projet ensemble. On va aller en Allemagne à la fin mars pour présenter The Accord au International Ocean Film Tour. Puis en avril, je m’en vais au Népal pour faire ma certification pour enseigner le yoga pendant un mois. En mai, j’irai en Indonésie, à Bali et probablement Sumbawa pour surfer. Je serai loin de la maison pendant tellement longtemps… l’Islande va vraiment me manquer! 

La présentation de The Accord se poursuit avec la tournée québécoise du Festival du film de montagne de Banff jusqu’au 17 mars 2017. Tous les détails ici.

 

Traduit de l’anglais par Sophie Lachance